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GNL russe : une ONG ukrainienne met la pression sur l’Union européenne

Russie Ukraine Union européenne GNL gaz fossile
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L’ONG ukrainienne climatique Razom We Stand a interpelé, fin juillet 2023, la Commission européenne pour lui demander d’interdire les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) et de gaz de pétrole liquéfié (GPL) venus de Russie. L’Union européenne a considérablement réduit ses achats de gaz fossile russe par gazoduc, mais le GNL russe pèse encore pour 7 % du total des importations gazières européenens. Couper les flux de GNL russe semble réaliste, mais la fin des commandes européennes, si elle arrive, n'empêchera pas Moscou d'écouler son gaz liquéfié, vues les tensions sur les marchés mondiaux.

Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, fin février 2022, l’Union européenne a réduit drastiquement ses importations d’hydrocarbures russes. Dans le cas du pétrole brut et du charbon, ce fut une décision ferme des Vingt-Sept de les interdire.

L’Union européenne importe encore 7 % de gaz russe, essentiellement sous forme de GNL

Dans le cas du gaz, la forte dépendance européenne aux importations russes, en particulier de certains pays (Allemagne en tête), a incité à beaucoup plus de retenue. C’est davantage Moscou qui a joué avec les nerfs européens, notamment en modulant le robinet du gazoduc Nord Stream 1 tout au long du printemps et de l’été 2022, avant d’interrompre pour de bon les livraisons par ce biais, suite au sabotage du gazoduc.

Aujourd’hui, la Russie livre toujours à l'Union européenne de faibles volumes de gaz par gazoduc, essentiellement par Yamal. Mais l’essentiel du gaz envoyé sur le sol européen l’est sous forme liquéfiée. Le GNL russe a ainsi couvert, au premier trimestre 2023, 16 % des importations de GNL de l’Union européenne, et 7 % de ses importations totales de gaz fossile.

12 milliards d’euros pour les finances russes sur la première année de guerre

Surtout, aucune mesure de restriction ou d’interdiction d’importation du gaz russe n’est actuellement en vigueur au niveau européen. Certains pays ont choisi de rompre avec Moscou, mais la Commission européenne se montre excessivement prudente sur le sujet, ne voulant pas revivre la crise de 2022, où le gaz a dû être acheté à prix d’or sur les marchés mondiaux par des pays risquant la pénurie.

Sur l’année qui a suivi l’invasion de l’Ukraine, les exportations de GNL vers l’Union européenne auraient rapporté environ 12 milliards d’euros à Moscou. En restant sur les volumes actuels, 9 milliards d’euros pourraient rentrer dans les caisses russes durant la seconde année de guerre.

L’Union européenne alimente « la machine de guerre du Kremlin chaque fois qu’elle achète du gaz russe »

Pour ces raisons, l’ONG climatique ukrainienne Razom We Stand (Nous sommes debout) est monté au créneau, réclamant le 25 juillet 2023 à la Commission européenne d’interdire les importations de GNL et de gaz de pétrole liquéfié (GPL) venus de Rurssie.

« Si l’UE veut soutenir l’Ukraine et mettre fin aux souffrances et aux crimes de guerre brutaux que nous subissons quotidiennement de la part de la Russie, elle doit cesser d’envoyer des milliards d’euros [qui alimentent la machine] de guerre du Kremlin chaque fois qu’elle achète du gaz russe », a déclaré Svitlana Romanko, fondatrice et directrice de l’ONG.

Les militants ajoutent une deuxième raison de dire « non » au GNL russe : la lutte contre le changement climatique. Moscou envisage en effet d’étendre ses capacités d’exportation de GNL, notamment via le projet Arctic LNG-2.

L’extension des ambitions russes dans le GNL, « une menace mortelle pour le monde »

« Si l’UE est sincère quant à ses engagements en matière d’action climatique et de fin de la guerre en Ukraine, alors les plans d’expansion du GNL de la Russie doivent être réduits à néant dans la foulée des gazoducs Nord Stream », complète Svitlana Romanko.

« Aujourd’hui, la Russie et ses plans détraqués d’expansion de l’industrie des combustibles fossiles représentent une menace mortelle pour le monde. La contribution des entreprises internationales à la construction de l’Arctic LNG-2 pourrait débloquer l’extraction de nouveaux gisements de gaz en Russie, déclencher des “bombes à méthane” et mettre hors de portée l’objectif climatique de 1,5 °C de l’accord de Paris », ajoute la lettre de l’ONG.

Abandonner le gaz russe, réaliste pour l’Union européenne ?

Pour l’heure, l’objectif officiel de l’Union européenne est de s’affranchir des combustibles fossiles russes en 2027. Mais certains analystes estiment possibles d’aller plus vite.

Le groupe de réflexion économique Bruegel s’est ainsi aligné sur les revendications de Razom We Stand, en indiquant que l’UE pourrait se passer dès à présent de gaz russe, la plupart des pays européens étant en mesure de « gérer confortablement » cette situation.

Reste que l'impact d'une telle interdiction sur le climat et les finances russes serait sans doute assez réduit. En effet, le marché mondial du GNL est plus souvent en flux tendu, et Moscou trouverait probablement d’autres débouchés pour son gaz.

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