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COP26 : quelle place pour le gaz naturel dans la transition énergétique ?

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La COP26 s'est ouverte ce 31 octobre à Glasgow, avec pour objectif de rehausser les objectif des pays signataires de l'Accord de Paris en terme de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. La place du gaz naturel dans la transition énergétique mondiale, notamment comme énergie « de transition », continue de faire débat dans les instances internationales, en particulier dans l'Union Européenne.

Le dernier rapport du Giec l'a martelé, preuves scientifiques à l'appui : le monde doit réduire urgemment ses émissions de gaz à effet de serre, en particulier de CO2, pour maintenir le réchauffement climatique sous les 2°C, voire, idéalement, sous les 1,5°C (trajectoire de l'Accord de Paris).

Comment intégrer le gaz naturel à la transition énergétique ?

La COP26, qui s'est ouverte ce 31 octobre 2021 à Glasgow, au Royaume-Uni, sera de ce point de vue décisive : elle a notamment l'ambition de finaliser les règles d'application de l'Accord de Paris et de rehausser l'ambition climatique, cinq ans après les premiers engagements.

Au-delà des questions géopolitiques qui risquent d'entraver la réalisation de ces objectifs, la place du gaz naturel dans la transition énergétique se pose avec force, notamment dans un contexte de flambée des prix, en partie à cause du marché du carbone européen, un mécanisme mis en place pour contraindre les Etats à réduire leurs émissions et, partant, leur consommation de combustibles fossiles.

Face à la flambée des prix de l'énergie, faut-il rouvrir le robinet des énergies fossiles...

Sur la double problématique de la transition énergétique et du prix du gaz naturel, trois positions s'opposent. Certains Etats militent pour une pause dans la volonté de réduire la consommation d'énergies fossiles, avec l'idée de prioriser l'économie à court terme sur le changement climatique à moyen terme, ou, du moins, de ne pas (ou plus) se soumettre à des accords multilatéraux pour déterminer leur consommation de combustibles fossiles.

C'est le cas de la Hongrie dans l'Union Européenne, vent debout contre le paquet Fit for 55, et c'est en partie le message que font passer la Chine ou la Russie en n'envoyant pas leurs présidents respectifs (Xi Jinping et Vladimir Poutine) à Glasgow.

… accélérer la transition énergétique avec des alternatives aux énergies fossiles...

D'autres Etats, à l'inverse, affirme que cette crise des prix doit renforcer la détermination à décarboner l'économie et l'énergie, via des investissements massifs dans les renouvelables, l'efficacité énergétique, éventuellement le nucléaire.

Cette position est par exemple celle du premier ministre britannique, Boris Johnson, dont le pays est particulièrement touché par la hausse des prix du gaz naturel, qui estime urgent de s'affranchir "des aléas des prix des hydrocarbures", et qu'une transition énergétique accélérée peut permettre au Royaume-Uni, en contrôlant une partei plus importante de sa production d'énergie, de « maintenir des coûts bas » dans le secteur.

L'Union Européenne dans son ensemble est également plutôt sur cette ligne. Le dernier Conseil Européen, tout comme la « boite à outils » proposée par la Commission pour répondre à la flambée des prix de l'énergie, recommandent ainsi de renforcer les investissements dans les renouvelables.

… ou favoriser renouvelables et gaz naturel aux autres combustibles fossiles ?

Reste la position médiane, proche de celle de l'Allemagne par exemple (dans l'attente de la nomination d'un nouveau chancelier) : elle consiste à défendre une transition énergétique forte, mais en faisant une exception pour le gaz naturel, comme « énergie de transition ».

L'Union Européenne hésite fortement sur cette problématique, et doit se prononcer d'ici la fin de l'année sur la place du gaz dans sa stratégie bas carbone, et notamment estimer si les investissements dans le gaz naturel peuvent être jugés « verts ».

Pourquoi l'électricité est centrale dans l'analyse de l'intérêt climatique du gaz naturel

La question est certes complexe, mais le gaz naturel présente des atouts. La question centrale porte d'ailleurs sur la production d'électricité. Le chauffage et l'eau chaude sanitaire sont, bien entendu, de vrais enjeux, mais ils dépendent directement de la production électrique.

En effet, sur ces usages, l'impact environnemental du gaz naturel est toujours supérieur à celui du fioul ou du charbon. Par rapport à l'électricité, tout dépend de son origine : une électricité décarbonée est certes préférable au gaz naturel pour le chauffage, mais utiliser directement du gaz présente un bilan carbone (et économique) nettement supérieur à un chauffage avec une électricité produite par du gaz naturel ou du charbon.

Pour les usages industriels du gaz, par exemple la production d'hydrogène : les décarbonner impose d'utiliser de l'électricité bas carbone. Dans les autres cas, le gaz naturel reste la meilleure option.

Le gaz naturel est l'énergie fossile la moins émettrice de CO2

Concernant la production électrique, l'impact du gaz naturel est le plus faible de toutes les énergies fossiles. Le rapport du Giec de 2014 évalue, sur la base de nombreuses études, les émissions des différentes sources d'électricité, en analysant l'ensemble du cycle de vie (construction, extraction et acheminement des matières premières, production d'électricité, démantèlement).

Avec 490 gCO2eq/kWh, le gaz naturel est ainsi presque deux fois plus « propre » que le charbon (820 gCO2eq/kWh). En revanche, il est très nettement plus polluant que le photovoltaïque (41 à 48 gCO2eq/kWh), la géothermie (38 gCO2eq/kWh), l'hydraulique (24 gCO2eq/kWh), le nucléaire (12 gCO2eq/kWh), l'éolien (11 à 12 gCO2eq/kWh), ou même la biomasse (230 gCO2eq/kWh).

Une centrale au gaz est pilotable presque en temps réel, un atout de poids pour les transitions énergétiques

Par ailleurs, la production d'électricité par gaz naturel a un avantage considérable, que les ingénieurs et spécialistes de l'énergie n'ignorent pas, mais qui est rarement mis en avant dans les débats publics : elle est pilotable. C'est à dire qu'une centrale au gaz peut augmenter ou diminuer sa production d'électricité pratiquement à la seconde près.

Cette question est centrale dans l'optique du développement des énergies renouvelables intermittentes (éolien et photovoltaïque). En effet, le réseau électrique a besoin d'un équilibre constant entre production et consommation d'électricité, en temps réel.

Intégrer beaucoup d'éolien ou de photovoltaïque dans le mix électrique pose donc de graves problèmes de stabilité au réseau électrique. Dans l'attente de solutions de stockage de très grande capacité et de flexibilité à très grande échelle, les réseaux s'ouvrant aux renouvelables intermittents ont besoin de sources d'électricité pilotables pour assurer leur stabilité.

Le poids géopolitique des producteurs de gaz risque de rester fort

Or, seules deux sources offrent assez de réactivité pour répondre à la variabilité de l'éolien et du photovoltaïque : l'hydro-électricité (mais il faut que le pays dispose d'un potentiel en la matière) et le gaz naturel. Dit autrement : un pays qui ne dispose pas d'un potentiel hydraulique fort ne pourra accueillir une grande quantité de renouvelables intermittents sans centrales au gaz. D'où la demande de nombreux Etats de soutenir la filière gaz pour pouvoir décarboner la production électrique.

Face à la flambée des prix et à l'urgence climatique, ces questions cruciales sont au cœur des débats sur les transition énergétique, et pourraient bien renforcer encore le pouvoir géopolitique des gros producteurs de gaz naturel (Etats-Unis et Russie surtout, mais aussi, dans l'ordre, Iran, Chine, Qatar, Canada, Australie, Arabie Saoudite, Norvège, Algérie) ou de pays disposant de larges réserves peu exploités, comme le Turkménistan, alors même que l'avenir de l'humanité pousse à abandonner l'exploitation de toute énergie fossile à moyen terme.

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