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Canada : une usine GNL réalisée avec le soutien des autochtones

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Souhaitant devenir exportateur de gaz naturel (au-delà de ses « échanges » avec les États-Unis), le Canada achève la construction d’un vaste gazoduc reliant les champs gaziers d’Alberta au littoral pacifique, avec comme point d'arrivé la petite ville côtière de Kitamat, où devrait se dresser, en 2025, la première usine de GNL du pays. L’ensemble du projet a bénéficié d’un partenariat avec la nation autochtone Haisla, consultée dès les prémices ; la population locale soutient le projet, qui devrait relancer l’activité économique locale. Même si les défenseurs de l’environnement se montrent (logiquement) plus sceptiques…

Le Canada souhaite se lancer dans le grand bain des marchés mondiaux du gaz, via l’ouverture d’une station de GNL. Le pays est un producteur majeur de gaz fossile (172,3 milliards de m³, 6ème producteur mondial, 4,3 % du total mondial en 2021), mais ses uniques capacités d’exportation sont deux gazoducs le reliant aux États-Unis.

Le Canada prêt à débarquer sur les marchés mondiaux de GNL

Les deux pays échangent du gaz tout au long de l’année, en fonction des besoins et des productions de leurs champs gaziers respectifs (ceux du Canada étant plutôt situé dans l’Ouest du pays, ceux des États-Unis à l’Est), le solde net étant souvent positif pour le Canada.

Mais Ottawa dispose d’importantes réserves, et pourrait assez facilement augmenter sa production. Depuis des années, des voix appellent à la création d’infrastructures pour exporter du gaz via des terminaux GNL, vers l’Atlantique ou le Pacifique.

Coastal GasLink et LNG Canada, seul projet GNL canadien en cours de finalisation

Mais si les projets sont légion, leur coût, leur impact environnemental (et l’opposition des partis et ONG écologistes) et la volonté de l’État de décarboner son économie ont enlisé la plupart d’entre eux. Aujourd’hui, un seul est en cours de finalisation, celui qui mène sur la côte Pacifique du pays, vers la ville industrielle de Kitimat, sur la rive ouest de la Colombie-Britannique.

Le port, tourné vers les marchés asiatiques, a été fondé par le groupe sidérurgique Alcan, dans les années 1950. Depuis, la ville grandit ou se contracte au gré des ouvertures et fermetures d’usines. Et depuis une dizaine d’année, c’est l’industrie du gaz fossile qui apporte l’essentiel de ses revenus à la cité. Radio Canada est récemment parti à la rencontre des acteurs de ce projet.

Le gazoduc Coastal GasLink, menée par le conglomérat TC Energy, qui relie les champs gaziers de l’Alberta à Kitimat, sera achevé en 2023. Au bout de ce gazofuc controversé, l’usine de liquéfaction du gaz fossile de Kitimat, baptisée LNG Canada, est en cours de finalisation : son ouverture est programmée pour 2025.

17 milliards d’euros pour exporter 14 millions de tonnes de GNL par an

Ce projet gigantesque, mené la major pétrolière néerlando-britannique Shell, aux cotés de Petronas (Suisse), Petrochina (Chine), Mistubishi (Japon) et la Korea Gas Corporation (Corée), s’étend sur 400 hectares, et est doté d’un budget de 17 milliards d’euros.

L’usine aura une capacité d’exportation de 14 millions de tonnes de GNL par an à sa mise en service, en 2025, avec la possibilité de la porter à 28 millions de tonnes si les investisseurs approuvent la seconde phase de construction de l’usine (en fonction, notamment, de l’évolution des marchés mondiaux du gaz).

7 000 ouvriers ont débarqué dans la ville, logés dans de vastes camps temporaires de standing, et le chantier booste les revenus de la ville, tant ceux de la mairie que ceux des commerçants.

LNG Canada a associé la tribu autochtone Haisla au projet

« C'est fantastique de travailler avec cette entreprise. Surtout quand on voit ce qu'elle a fait pour l'économie et pour les emplois. LNG Canada a réussi à réduire les effets négatifs sur la ville », se félicite ainsi le maire de Kitimat, Phil Germuth.

Mais surtout, LNG Canada a souhaité associer la nation Haisla, peuple autochtone installé à 15 kilomètres de la ville, à la réalisation de l’usine, via de longues négociations, une participation financière, et la garantie d’emplois bien payés pour un grand nombre de membres de la communauté.

A l’annonce du projet, en 2012, le chef Haisla de l’époque, Ellis Ross, devenu depuis député provincial de la région, y était opposé. « J'ai commencé à comprendre que le projet d'usine pourrait être une solution à tous nos problèmes : la pauvreté, le chômage, le suicide », reconnaît-il.

Un concert de louanges...

Désormai, la cheffe conseillère de la tribu Haisla, Crystal Smith, collabore étroitement avec Hope Regimbald, responsable des relations avec les Autochtones pour LNG Canada, et membre de la nation Woodland Cree. « Depuis le début, c'était important d'écouter et de consulter la nation Haisla, et d'inclure sa perspective dans le projet. C'est devenu central », indique Hope Regimbald.

Ce projet a même réussi à rapprocher les différentes parties prenantes. « La relation avec les Haisla est 100 % meilleure qu'avant, et c'est LNG Canada qui nous a rapprochés », reconnaît Phil Germuth.

… mais aussi des voix discordantes

Les voix ne sont toutefois pas unanimes pour saluer le projet, y compris auprès de la nation Haisla. « Il y a beaucoup de bénéfices de l'industrie gazière. On le voit de manière quotidienne. Mais Dieu seul sait quelles seront les conséquences dans 5 à 6 ans, quand les navires gaziers navigueront tous les jours dans le chenal Douglas », pointe ainsi l’ancien chef Sammy Robinson.

Plus globalement, les organisations environnementales canadiennes s’inquiètent de la création de nouvelles capacités d’exportation de gaz fossile, alors que le pays s’est engagé à œuvrer pour sa neutralité carbone, et celle de la planète.

Les défenseurs du projet arguent que LNG a promis la neutralité carbone des activités de l’usine (avec une réduction au maximum des fuites, une électrification quasi-totale et une compensation des émissions résiduelles) et que le gaz, destiné à l’Asie, à la Chine en particulier, permettra de remplacer des centrales à charbon, plus polluantes.

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