Actualités sur le gaz : exploration et extraction, acteurs, technologie, consommation, ...

Gazprom vend son gaz aux enchères pour la première fois de son histoire

Gazprom Europe Russie gaz enchères
Rédigé par

Gazprom a innové en marquant une rupture dans la stratégie du groupe qui consistait jusqu'ici à préférer des contrats à long terme. L'entreprise publique russe a en effet commencé à vendre aux enchères du gaz à l'Europe.

Le géant gazier russe a annoncé avoir mis sur le marché près de 3,24 milliards de mètres cubes de gaz aux enchères, répartis en 127 lots pour livraison dans le nord-ouest de l'Europe pendant l'hiver. "Le marché européen du gaz change constamment et, face à ces difficultés, nous voulons tester cette nouvelle forme de commerce du gaz et voir quels avantages ils peuvent apporter au vendeur et aux acheteurs", a commenté Alexandre Medvedev, le PDG de la filiale export du groupe. Le groupe russe estime que ce système de vente lui permet de compléter son système de contrat à long terme.

Une goutte d'eau dans la production du groupe

Il s'agit seulement d'une petite révolution sur le marché du gaz. Car même, si c'est la première fois dans son histoire que Gazprom se lance dans un processus d'enchère pour vendre du gaz en Europe, il s'agit d'une goutte d'eau au vue des exportations totales du groupe. En effet, 3,2 milliards de mètres cubes représentent en équivalence, la consommation d'un pays comme la Suisse ou le Danemark. Or, Gazprom exporte annuellement près de 160 milliards de mètres cubes. L'initiative n’en est pas moins très symbolique. « C’est un changement radical pour Gazprom, qui vendait jusque-là son gaz essentiellement par le biais de contrats long terme, assis sur les prix du pétrole », constate Thierry Bros, analyste à la Société Générale.

Il n'en demeure pas moins que Gazprom reste très attaché à son système de contrats à long terme indexés aux cours du pétrole et contraignants en termes de volumes, qui apportent tout de même aux clients la sécurité des approvisionnements tout en lui permettant d'investir à long terme dans les infrastructures. Mais ce  type de contrat plébiscité par Gazprom est désormais dans le collimateur de Bruxelles. La Commission européenne estime que la forme de ces contrats permet à Gazprom de profiter et d'abuser de sa position dominante dans plusieurs pays d'Europe centrale et orientale. En avril dernier, Bruxelles avait ainsi effectué une communication de griefs auprès du géant gazier, qui peut ensuite aboutir à une lourde amende.

Il a ainsi été contraint de revoir les clauses d’indexation des prix dans ses contrats, pour leur faire supporter une part croissance indexée sur les prix « spot » du gaz, au détriment des prix du pétrole. Parfois, au terme de discussions tendues, avec l’italien ENI ou les allemands RWE et E.ON. Depuis, le groupe a recueilli une marque de soutien des principaux fournisseurs d'énergie européens qui se sont associés à son projet de renforcement du gazoduc Nord Stream via les fonds de la mer Baltique. Il a annoncé tout récemment la signature d'un pacte d'actionnaires dans ce sens avec les groupes allemands BASF et E.ON, le français Engie, l'autrichien OMV et l'anglo-néerlandais Shell.

Une obligation de réaction

Malgré tout, depuis quelques années, la position du groupe russe sur le marché européen est toutefois de plus en plus défensive. Alors qu’il fournit à l'Europe environ 30% de son gaz, Gazprom a été confronté à la fois à la baisse des prix et à la contraction de la consommation. La crise ukrainienne a également augmenté la défiance européenne vis-à-vis de son premier fournisseur de gaz et l'Union Européenne ne se cache plus de vouloir à tout prix réduire sa dépendance au gaz russe. A côté de cela, le marché mondial du gaz a été bouleversé avec l'émergence du gaz de schiste et le développement du gaz naturel liquéfié. Autant de concurrence nouvelle pour l'entreprise russe.

Ces premières enchères sont donc un moyen pour Gazprom un moyen de « tester un nouveau mécanisme » de commercialisation de son gaz, ayant vocation à devenir « un outil additionnel, et non pas une alternative aux contrats à long terme qui assurent la sécurité énergétique de l’Europe », a indiqué le groupe. L’opération sera considérée comme un succès si le prix atteint grâce aux enchères « excède le prix moyen du portefeuille de Gazprom », a souligné Alexandre Medvedev.

Les résultats de ces enchères seront connus prochainement. Enchères auxquelles se sont qualifiées 39 sociétés parmi lesquels Vitol, Goldman Sachs, Glencore ou encore Novatek Gas & Power.

0 Commentaires

Laisser un commentaire

À la Une aujourd'hui