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Thermique en France : vers un gel programmé ?

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La dynamique de réduction des émissions de gaz à effet de serre incite la France à réduire la part des centrales thermiques dans sa production d’électricité. Cependant, devant la violente vague de froid qui traverse l’Hexagone, la flexibilité et la grande réactivité des centrales thermiques contraint EDF à se tourner à nouveau vers des sources d’énergie fossiles pour ajuster sa production. Un scénario qui pourrait se répéter dans le futur, tant que la capacité de production qu’elles représentent ne sera pas compensée par celle des énergies renouvelables, encore en développement.

Alors que la vague de froid s’installe en France (6 à 8°C en dessous des normales saisonnières) depuis la mi-janvier et que des températures négatives sont encore annoncées pour plusieurs jours, la consommation d’électricité des foyers français, chauffés pour plus de 30% à l’électrique, explose. Selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), lors d'une vague de froid, le chauffage « peut représenter jusqu'à 40% de la consommation électrique en début de soirée ». De quoi faire craindre une pénurie d’électricité au premier fournisseur d’électricité de l’Hexagone, EDF.

D’autant qu’au caractère persistant de cette période de froid s’ajoute deux facteurs. D’une part, et alors que le parc nucléaire français assure plus de 75% de la production électrique française, l’indisponibilité de 6 réacteurs nucléaires sur les 58 habituellement en fonctionnement. D’autre part, la réduction de la puissance du parc thermique tricolore (centrales au fioul, charbon, gaz) pour raisons économiques et écologiques. Les énergies fossiles, en effet décriées pour les importantes émissions carbones qu’elles occasionnent, n’ont en effet pas résisté au phénomène de « décarbonation » des mix énergétiques nationaux, et les centrales thermiques classiques ont progressivement été remplacées par des installations d’énergies renouvelables (EnR).

Dispositif de vigilance national...

La ministre de l’Environnement, de l’Energie et de la Mer, Ségolène Royal, a d’ailleurs salué l’avancée du déploiement des EnR, soulignant qu’« avec les très bonnes conditions météorologiques, les énergies renouvelables, l'éolien et le solaire, [allaient] produire l'équivalent de huit réacteurs nucléaires, huit gigawatts ». De bons résultats qui n’ont toutefois pas empêchés RTE, le gestionnaire du réseau électrique français, de déclencher un dispositif de vigilance électrique dès le 16 janvier dernier pour faire face à la hausse de consommation attendue et éviter les coupures d’électricité. Ce dispositif, associé au plan « grand froid » mis en œuvre par le ministère de l’Energie, devrait assurer la sécurité d’approvisionnement électrique sur le territoire national.

...contre vulnérabilité régionale

Une mission plus ou moins aisée selon les régions. La Bretagne en est l’exemple le plus significatif. Ne produisant que 10% de l'électricité qu'elle consomme, du fait de l’absence de centrale nucléaire sur son sol, le territoire importe la majorité de son énergie des centrales situées dans la vallée de la Loire. Cette dépendance n’est pas le fruit du hasard : l’opposition bretonne à la construction de le centrale de Plogoff dans les années 1980 et le peu de capacité hydraulique de la région ont eu tôt fait de provoquer sa vulnérabilité énergétique, souligne Gilles Petitjean, directeur de l'ADEME Bretagne.

Une vulnérabilité problématique en cas de pics de consommation : une baisse du mercure d’un degré provoquant une hausse de la consommation de la région de 150 mégawatts, soit l'équivalent de la consommation électrique de la ville de Brest. Aussi, pour faire face à cette surconsommation passagère, d’anciennes centrales, pour l’essentiel dormantes, ont été réactivées. Dépourvue de nucléaire, la Bretagne dispose toutefois à Dirinon et Brennilis de centrales thermiques au fioul rapidement mobilisables. Ces dernières ne sont généralement activées que quelques dizaines d'heures par an. Ainsi, le 18 janvier dernier, la centrale de Brennilis a apporté un complément d’électricité de 125 mégawatts au réseau électrique breton. De même, la semaine dernière, la centrale de Cordemais (Loire-Atlantique) a été relancée en soutien à la demande en électricité du département du Finistère. Deux tranches au charbon (1 200 MW de capacité) et une tranche au fioul ont ainsi été mobilisées. « C’est une situation assez exceptionnelle et nous activons des moyens habituellement très peu sollicités », a expliqué le directeur de la centrale, Denis Florenty. Une centrale dont la direction d'EDF a en effet prévu de fermer les tranches fioul et charbon d'ici 2018 en raison de leur faible utilisation et de leur coût, mais surtout en raison des efforts consentis pour réduire le parc thermique à flamme tricolore.

Le thermique comme recours ?

S’il est une chose que cette réactivation fortuite souligne, c’est bien que la capacité du thermique à se présenter en véritable recours en cas de besoin d’équilibrage de l’offre et de la demande en électricité. Dans son bilan électrique 2015, RTE souligne d’ailleurs qu’« en 2015, malgré les forts taux de progression des productions éolienne, solaire et bioénergies, on observe une baisse de la production d’électricité renouvelable en France, due à une faible pluviométrie qui a entraîné une baisse de production hydraulique ». Et le transporteur de poursuivre « Afin de compenser cette baisse, les centrales thermiques fossiles ont été sollicitées ».

En France, la quantité d’électricité renouvelable produite depuis 1970 n’a que faiblement augmenté. De nombreux engagements ont été pris afin de renforcer la proportion des EnR dans le mix énergétique français. La réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production d’électricité française d’ici à 2025 (contre plus de 75% aujourd’hui) en est un. Ces engagements supposent toutefois d’accélérer le développement des énergies renouvelables et de trouver un moyen d’assurer la continuité de leur production. Les EnR représentaient à peine 17,4% de la production électrique tricolore en 2015. On est encore loin du compte. Si la décarbonation du mix énergétique français est nécessaire, il est peut-être quelque peu prématuré d’en bannir les outils de production thermiques à flamme à court terme.

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