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Après une année gazière mouvementée, quelles perspectives pour l’Union européenne ?

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Au sortir d’une année 2022 qui a vu la consommation de gaz fossile s’effondrer, les importations de GNL exploser et les liens avec l’allié états-unien se resserrer, l’Union européenne est à la croisée des chemins. Les équipements liés au GNL continuent de se multiplier (en Allemagne, en Grèce, en Croatie...). Et la place de la Russie reste centrale. Le ministre de l’Energie du Qatar estime d’ailleurs qu’à moyen terme le gaz russe reviendra en Europe…

Pour l’Union européenne, l’année 2022 aura été marquée par de nombreuses ruptures dans sa politique énergétique, en particulier en ce qui concerne le gaz fossile. La situation géopolitique, avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les sanctions occidentales et le jeu de poker menteur du Kremlin sur les livraisons de gaz fossile par gazoduc, ont imposé une forme de sobriété au vieux continent.

En 2022, en Union européenne, la consommation de gaz fossile a baissé de 13 % et les importations russes de 55 %...

Cette sobriété gazière a certes conduit à rouvrir ou faire tourner à plein régime des centrales au charbon, fortement émettrices de CO2, mais a globalement fait baisser la consommation de gaz fossile de l’Union européenne. L’Agence Internationale de l’Energie (AIE) l’estime à 360 milliards de m³, contre 412 milliards de m³ en 2021, soit une baisse de 13 %.

Dans le même temps, et sans surprise, les importations de gaz russe vers l’Union européenne se sont effondrées de 55 %, estimée à 70 milliards de m³ en 2022, contre 155 milliards de m³ en 2021.

… et les importations de GNL sont en hausse de 60 %, tirés par les États-Unis

155 milliards de m³, c’est aussi le volume de GNL importé par l’Union européenne en 2022, en hausse de 60 % par rapport à 2021, selon le groupe de réflexion IEEFA (Institute for Energy Economics and Financial Analysis).

Cette hausse a été majoritairement soutenue par le GNL américain, dont les volumes importés ont été quasiment multipliés par 2,5 entre 2021 et 2022 (+143%). Si les pays européens ont réussi à remplir aussi vite leurs réserves de gaz et devraient passer l’hiver 2022-2023 sans encombre (bien aidés par des efforts de sobriété et une météo particulièrement clémente), ils le doivent beaucoup à l’Oncle Sam.

Un rapprochement géostratégique de l’Europe avec son allié atlantique

Et si les États-Unis ne se sont pas montrés particulièrement philanthropes (ce GNL a été vendu au prix de marché, donc excessivement cher - le plus souvent, d’ailleurs, par des majors pétrolières disposant de contrats à long terme avec les fournisseurs états-uniens), ce soutien a été crucial pour l’Union européenne.

Il est en phase avec les évolutions géostratégiques, la guerre menée par la Russie de Vladimir Poutine ayant rapproché les Européens de leur allié atlantique, l’OTAN reprenant du sens alors qu’il tendait à devenir une coquille vide sous les administrations Obama et Trump. Suède et Finlande ont d’ailleurs demandé à intégrer l’alliance atlantique, brisant un tabou de l’époque soviétique, même si cette adhésion est pour l’instant bloquée par la Turquie.

Le GNL, nerf de la guerre énergétique européenne

Derrière les États-Unis, le podium des importateurs de GNL en Europe est complété par le Qatar et… la Russie. Les deux pays ont connu une hausse de leurs exportations de GNL vers l’Union européenne, mais plus modeste (respectivement +23 % et +12%).

Le Qatar pouvait difficilement augmenter davantage sa production, et est lié par de nombreux contrats de long terme. Mais l’état gazier a relancé les forages de ses champs gaziers, et devrait fortement augmenter ses capacités d’export de GNL dans les années à venir.

Renforcement des infrastructures de GNL dans l’Union européenne

L’Union européenne continue d’ailleurs de renforcer ses infrastructures GNL. L’Allemagne a inauguré, le 14 janvier 2023, son second terminal de stockage et regazéification, fourni par TotalEnergie, à Lubmin, sur la mer Baltique.

Le 10 janvier, la Croatie a annoncé qu’elle allait étendre les capacités de regazéification de son propre FSRU, sur l’île de Krk, au nord du pays. Pour l’heure de 4 milliards de m³ par an, elles devraient passer à 6,1 milliards de m³. Inauguré en janvier 2021, ce terminal a surtout servi à acheminer du GNL américain vers le vieux continent.

La Grèce va, quant à elle, construire une nouvelle centrale au gaz fossile à Alexandroúpoli, dans le nord du pays, qui sera alimentée exclusivement par l’unité de regazéification en construction dans la région – et donc exclusivement par du GNL.

Quelle place pour la Russie ?

Dans ce ballet du GNL, la place de la Russie interroge. Elle a donc augmenté ses exports de GNL vers l’Union européenne, acheté à prix d’or par des clients européens, notamment français (importateur numéro 1 de GNL russe en 2022), et continue de livrer par ses gazoducs continentaux, Nord Stream étant hors service.

Et si, à court terme, le scénario le plus probable oscille entre un statu quo (des livraisons réduites mais qui se poursuivent) et une rupture pure et simple (en cas d’évolutions géopolitiques majeures, ou en fonction de la guerre en Ukraine). Mais à moyen terme, la donne pourrait être bien différente.

C’est du moins l’avis de Saad Sherida al-Kaabi, ministre de l'Energie du Qatar et patron de QatarEnergy, la compagnie nationale de l’émirat gazier. « Le gaz russe va revenir, à mon avis, en Europe » même si cette dernière a désormais « une diversité bien plus grande » des sources d'approvisionnement. « Les Européens disent aujourd'hui qu'il n'en est pas question, mais les choses se réparent avec le temps », a-t-il affirmé lors d'un forum sur l'énergie à Abou Dhabi.

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