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Quels enseignements tirer du dernier Forum des Pays Exportateurs de Gaz ?

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Ce 22 février 2022, alors que l’invasion de l’Ukraine par la Russie se préparait, les onze pays membres du Forum des Pays Exportateurs de Gaz (FPEG) se sont réunis à Doha. Ils ont confirmé qu’en cas de coupure des robinets de gaz naturel russe vers l’Europe, ils ne pourront pas fournir seuls le gaz manquant. La réunion a été également marqué par des déclarations offensives de l'Iran, un discours optimiste du président algérien, et des avancées sur la fourniture de GNL par le Qatar au Liban.

Ce 24 février 2022 au matin, l’armée russe a lancé une vaste offensive sur l’Ukraine, comme le craignait la communauté internationale depuis plus deux mois. L’OTAN, les Etats-Unis et l’Union Européenne ont promis une vague de sanctions diplomatiques, économiques et militaires sans précédent.

La Russie envahit l’Ukraine : quelle conséquence pour le gaz dans l’Union Européenne ?

L’ouverture du gazoduc Nord Stream 2 a déjà été retardée sine die par l’Allemagne, et l’Union Européenne envisage sérieusement de cesser de se fournir en gaz naturel russe, qui représente tout de même 40 % de son approvisionnement. La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait d’ailleurs affirmé que l'UE était capable de se passer du gaz russe cet hiver en cas de décision de Moscou de réduire ou cesser ses livraisons.

Cette question hautement délicate était au coeur de la dernière réunion du Forum des Pays Exportateurs de Gaz (FPEG), ce 22 février 2022 à Doha. Pour rappel, le FPEG est composé de onze pays (Qatar, Russie, Iran, Algérie, Bolivie, Egypte, Guinée équatoriale, Libye, Nigeria, Trinité-et-Tobago et Venezuela) et sept pays associés, qui revendiquent 70 % des réserves prouvées et 51 % des exportations de GNL. Il es à noter que ni les Etats-Unis ni l’Australie, autres grands exportateurs de gaz fossile, ne font partie du FPEG.

Le Qatar se félicite de l’action coordonnée du Forum des Pays Exportateurs de Gaz face à la crise énergétique

L'émir du Qatar, le cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, qui organisait la réunion, s’est félicité de la bonne tenue du FPEG durant la crise énergétique de cet automne et de cet hiver : "Nous apprécions les efforts de tous les membres (du FPEG) qui ont travaillé dur pour assurer un approvisionnement crédible et fiable en gaz naturel au marché mondial et pour préserver la stabilité de ces marchés", a déclaré l’émir en ouverture du sommet.

Le Qatar s’est d’ailleurs fait l’émissaire des pays envisageant de soutenir l’Union Européenne en cas de défaut du gaz russe (étant entendu que les deux autres leaders du FPEG, la Russie et l’Iran, sont exclus de cette possibilité).

Quel aide peut apporter le Qatar et le FPEG à l’Union Européenne dans son approvisionnement en gaz ?

Le ministre qatari de l'Energie Saad Cherida al-Kaabi, a réassuré l'Europe de sa volonté de lui accorder son "aide" en cas de difficultés d'approvisionnement, mais en rappelant que cette aide serait limitée aux volumes disponibles, les producteurs étant liés à "des contrats de long terme".

Selon lui, « les volumes qu'on peut rediriger représentent environ 10% à 15% » de l’approvisionnement européen en gaz naturel. Or, « la Russie représente 30% à 40% des approvisionnements de l'Europe » et « remplacer rapidement ce type de volumes est quasiment impossible », a-t-il complété.

Les autres membres du FPEG se sont tenus sur cette position, indiquant que leur capacité d’exportation supplémentaire étaient limitées, un phénomène encore amplifié par l’absence de visibilité sur les prix et les craintes sur les évolutions futures de la demande dans un contexte de transition énergétique, renforcées par la réticence de l’Union Européenne à signer des contrats de fourniture à long terme (10, 15 ou 20 ans).

En filigrane, les annonces rassurantes d’Ursula von der Leyen sur la fourniture de gaz dans l’Union Européenne peuvent se comprendre comme une assurance de soutien américain en cas de rupture avec le Kremlin.

L’Iran : le gaz pour reprendre pied sur la question du nucléaire ?

En dehors de cette question brûlante, ce FPEG a été l’occasion pour l’Iran de rappeler, par la voix de son président Ebrahim Raïssi, qu’il disposait « d’importantes capacités de production et d'exportation de gaz », tout en déplorant les « sanctions cruelles et illégales des États-Unis ».

Une manière de mettre la pression sur la diplomatie américaine et internationale, dans un contexte de reprise de négociations sur le nucléaire iranien. Téhéran veut-il faire du gaz un outil pour mieux faire accepter sa volonté de développer du nucléaire civil ?

Abdelmadjid Tebboune rappelle la place du gaz naturel pour répondre aux défis de demain

De son coté, le président algérien Abdelmadjid Tebboune a profité de la réunion pour rappeler la place centrale du gaz naturel (et donc du FPEG) dans le contexte énergétique mondial : « Le défi de la santé mondiale, le défi de l’accès à l’énergie et le développement durable : notre organisation peut jouer un rôle important pour faire face à ces défis (…) Notre capacité en tant que communauté internationale (…) à faire face à ces défis ensemble dépend des choix qui vont être fait aujourd’hui », a précisé le président Tebboune.

Le Qatar va fournir du GNL regazéifié au Liban

Enfin, cette réunion du FPEG a été l’occasion pour Saad al-Kaabi de révéler que le Qatar négociait avec le Liban une solution « de long terme » d’approvisionnement en gaz naturel.

Tout en reconnaissant que le Qatar était satisfait de la solution à court terme choisi par le Liban, à savoir se fournir en gaz égyptien (conformément à une initiative américaine annoncée en août 2021), Saad al-Kaabi a convenu que l’option la plus « simple » consisterait à « regazéifier le gaz liquide fourni par le Qatar dans un autre pays », en l’occurrence en Jordanie, à Aqaba.

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